Voyage en Italie: Retour à l’école du Barolo avec Marie-Thérèse Mascarello
Maria-Teresa a repris le domaine familial Bartolo Mascarello. Est-ce l’imprégnation du machisme italien exacerbé sous l’aire Berlusconi ou simplement ses convictions personnelles qui ont fait ne pas dévier d’un pouce à Marie-Thérèse la voie tracée par son père ?
Comme elle a aussi hérité de sa maman un tempérament de maitresse d’école, je n’irais pas plus loin dans la provocation. Ma boutade traduirait mal le plaisir que j’ai eu à la rencontrer en cette fin de semaine de visite chez les vignerons autour de Barolo.
Sa maitrise de français et son action pour la promotion du Barolo (elle vient régulièrement présenter ses vins en France sur des salons amateurs pour réparer l’injustice de la méconnaissance du Barolo par les œnophiles franchouillards) font d’elle un des avocats éloquent de la tradition vinicole dans les Langhe.
Ici, faire du vin est un engagement pour mettre en pratique ses convictions. En ce cinquième jour de visites, je commence à distinguer dans les chais ce qui permet de ranger le vigneron dans une des cases entre le traditionnaliste et le moderniste. C’est évidemment simpliste mais je suis venu là pour apprendre à connaitre les vignerons et c’est plus facile pour commencer de dresser des grands traits avant d’aller dans le détail et la complexité. Ici donc, un pressoir vertical (pas la place de toute façon pour un roto-fermenteur, même si cela doit être un gros mot comme barrique), que des foudres (fabriquant autrichien) parce-que son père se retournera dans sa tombe le jour où une barrique française mettra le bout d’une douelle dans les chais, dont deux tronconiques élancés qui seront renouvelés cette année.
Les macérations sont plutôt longues (entre 30 et 40 jours). Les levures peuvent être sélectionnées pour permettre aux fermentations de se terminer. A la vigne la certification bio n’est pas recherchée parce-que l’interdiction des produits chimiques pourrait compromettre la récolte une année à la météo difficile. Le domaine n’a pas les volumes suffisant pour se permettre de perdre une partie de ses vendanges.
Ici, les trois cépages de l’appellation sont cultivés, plus le Fresia (traditionnel au village de Barolo) que nous n’aurons pas pu déguster (petite production vite épuisé entre deux millésimes).
Dégustation en compagnie de cinq étudiants de Savigny lès Beaune aussi en fin de 10 jours de visites viticoles dans la région.
Dolcetto 2013
N’a qu’un mois de bouteille. Nez fruité, un peu fumée et l’amertume de l’amande. Finale piquante un peu tannique. (nous apprenons que le Dolcetto est ici traité royalement: beaucoup de soucis à la vigne et au chai pour ce vin vendu bien moins cher que le nebbiolo, et qu’avec le temps, la bouteille peut prendre des airs nobles de nebbiolo de Barolo, ce qui dans les milieux autorisés locaux se dit “barolejare” transcription phonétique. Encore une similitude avec la Bourgogne où les meilleurs crus de Beaujolais “pinote” avec l’âge.)
Barbera 2012
elevage de deux ans en foudre. Nez de fruits mûrs. bouche sur acidité mais avec amertume fait ressortir le fruit sur la longueur. Croquant.
Langhe Nebbiolo 2012
Sur ce millésime, ce sont majoritairement les jeunes vignes du Cru Cannubi. Nez sur de jolis notes fruitées. De l’astringence (tanins sur le devant de la bouche: sol de tuffeau dans ma grille de lecture ?) Sympa mais pas la gourmandise croquante du Barbera.
Barolo 2010
Nez fleurs fanées, fumée et la tension de la groseille. Bouche sur l’acidité (comme le nebbiolo). Tanins soyeux, très en finale. Très long. Belles odeurs le verre vide, comme sur les Bourgogne de Thibault Liger Belair, marque que le raffinement d’un vin n’est pas un descriptif gentil pour un manque de matière. Evidemment, j’aime. Mais je fais désormais partie des amateurs qui ne boivent plus un Mascarello à l’aveugle.