Les nouveaux Saint Emilion Grand Cru Classé se montrent à Paris
L’actualité juridique bordelaise 2012 a permis de conclure les querelles de clochers dans le Libournais en publiant la liste des châteaux pouvant revendiquer le classement de Saint Emilion Grand Cru Classé revu en 2006. A l’image du monde politique où certaines élections de présidents nord-américain ou plus récemment de parti français, les vaincus des élections contestent souvent le résultat des urnes.
Au final, le côté “Bisounours” du nouveau classement (pas de déclassés) de Saint Emilion Grand Cru Classé discrédite ce jugement qui se veut qualitatif ou voudrait encourager la progression, et augmente l’inintérêt de ces classements bordelais, de même que les hausses de tarif de ces bouteilles classées les éloigne de ma bourse.
Pourtant, je dois aux dégustations organisées par Terres de Vins d’avoir souvent secouées mes préjugés ou simplement de m’ouvrir de nouveaux horizons.
Ce mois-ci, les journalistes pour illustrer une de leurs dégustations récentes conviaient leur sélection de châteaux de Saint Emilion Grand Cru Classé (hors A et B) à venir présenter leur 2010 aux amateurs parisiens.
Nous voilà donc pour deux heures dans une des salles de réception de l’hôtel Saint James d’Albany dans les beaux quartiers parisiens, pas très loin des salles du Grand Tasting.
De la même façon qu’une dégustation de vins “natures” attire sa faune de bobos parisiens, ici les vins de châteaux bordelais imposent un dressing code plus classieux. Depuis ma banlieue, ce que je prends pour de la classe n’est certainement que le costard quotidien de travail dans les bureaux de ces quartiers. Les stéréotypes, ça ne sert pas qu’à faire quelques traits d’humour sur un blog, cela permet aussi de vendre une image en plus de l’étiquette de la bouteille.
Pour ce soir, je dégustais tous les vins proposés en jouant de chance puisque les premiers vins dégustés étaient épuisés avant la fin.
Sur cet échantillon de châteaux, j’ai été surpris de gouter des styles assez différents. Je reviens de loin parce-que le Merlot bordelais comme le Grenache rhodanien sont des cépages qui jouent sur des registres qui me font généralement faire la grimace. J’ai récemment secoué mes préjugés grâce à une dégustation de Châteauneuf du Pape. Ce soir-là, j’ai trouvé des merlots à mon gout même si j’ai tendance à préférer la puissance putassière (clin d’œil à un article sur un humoriste du magazine Terre de Vins en question) de certains parce-qu’ils me rappellent mes bons souvenirs de vins chiliens.
Ci-dessous les vins dégustés, dans l’ordre aléatoire de ma progression sur les stands en me faufilant dans la foule comme dans une rame de métro à 18h00.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Grand Corbin-Despagne 2010
Nez brulé. Bouche tendue avec des pointes de verdeurs. Beau corps sur grillé et légèrement mentholé.
C’est le premier vin dégusté. Pour une mise en bouche, cela me rappelle que les bordelais aiment bien la barrique neuve. Mais son interprétation est ici séduisante.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Fombrauge 2010
Nez fruité, chaleureux (annonce la rondeur). Un peu de sous-bois (humus). Bouche plutôt tannique (pas la verdeur du raisins). Astringence marque les gencives.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Cadet-Bon 2010
Nez en retrait. Du nerf, de la sève. Des tannins. Un peu court: ne s’élargit pas vraiment.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Clos La Madeleine 2010
Nez grillé et moderne (menthol). Tension en bouche fait glisser la chaleur. Mais se paye par un peu de sècheresse de l’alcool en finale. Pas d’astringence. Sur le fruit, presque du croquant.
Un style chaleureux et gourmand qui me plait.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Grand-Mayne 2010
Nez sur le vernis (acétone). Tendu. Tannins glissent bien. Un peu court et le nez ne donne pas vraiment envie d’y revenir.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Rochebelle 2010
Nez vanille et glace au café. L’élevage semble ici discret. Moins capiteux en bouche, mais pas de sècheresse. Pas de la maigreur, plutôt de la rigueur. Verdeur sur la fin avec des notes mentholées inattendues dans le cadre classique de ce vin.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château de Ferrand 2010
Nez mentholé, suave. Bouche semble fluette. Tannins accrochent peu. Peu exubérant comparé à la promesse du nez. Mais pas de faiblesse.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Jean Faure 2010
Nez grillé. Bouche un peu verte, avec astringence des tanins.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Fleur Cardinale 2010
Nez très grillé, épicé. De l’élégance. Bouche tendue assure une belle présence et un soyeux agréable.La finale mentholée dure. Un coup de cœur.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château de Pressac 2010
Nez discret. Du fruit croquant. Sans astringence, nerveux. Peu de volupté. Mais sur la tension. Pour la garde parce-que peu de plaisir pour moi à ce stade ?
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Soutard 2010
Profil exubérant au nez (grillé, épices). Bouche explosive. Pas de tannins accrocheurs. Bien, dans son style.
Bordeaux Saint Emilion Grand Cru Classé, Château Dassault 2005
Nez sur un début d’évolution (cuir). Bouche tendue, commence à être vineux. Tannins soyeux.
A mon avis, dans une bonne phase. A boire maintenant avant que les arômes d’évolution du Merlot ne prennent le dessus.