Voyage en Italie: franchissement du Tanaro, passage en Roero chez Luca Faccenda
L’avantage de venir pour la première fois dans une région viticole est de n’avoir aucun préjugé ni contact, comme une dégustation à l’aveugle.
J’avais bien sûr biaisé un peu mon choix en me fiant aux avis positifs trouvés par les internautes sur les forums et les blogs. Michel Grisard est un vigneron de Savoie que je rencontre depuis plusieurs années et dont les vins m’ont fait découvrir le potentiel des vins rouges de sa région. C’est aussi un grand amateur des vins transalpins. J’ai pu profiter de ses contacts sur place et être accueilli par Luca comme un ami par les amis de mon ami, en en français.
Luca est un jeune œnologue conseil qui travaille pour plusieurs vignerons dans la région. Sa famille a quelques vignes dans le Roero sur la commune de Canale qu’ils louent à des vignerons. Lucas a commencé à prendre une partie de ces vignes en 2010 pour faire son propre vin, un peu lassé d’appliquer des recettes pour d’autres, efficaces mais donnant des vins qui ne correspondent pas à ses gouts. Il exploite actuellement à peu près 2 ha. C’est largement suffisant pour le temps que son travail d’œnologue lui laisse.
Un agenda très serré, sollicité en permanence par son smartphone, c’est en fin d’après-midi qu’il me confirme le rendez-vous et nous arrivons ensemble par des chemins séparés à Val Faccenda. Encore introuvable sur Google Maps (44.811526 ; 8.000188) un discret panneau au bord de la route pour Madona di Loretto indique le chemin de terre menant à la maison familiale au pied d’une des parcelles bien pentue. L’extension destinée à accueillir la cave n’est pas encore exposition sudfinie mais avec l’aide de la météo qui retarde la maturité du raisin, peut-être que les travaux seront assez avancés pour que les chais accueillent la nouvelle vendange.
Nous faisons un tour dans les vignes notamment dans ces jeunes Arneis (cépage blanc local, typique de l’appellation Roero) renouvelés sur une sélection massale. A cause de ses petits grains, l’Arneis est appelé le nebbiolo blanc (le nebbiolo étant le cépage rouge du Barolo caractéristique pour ses petites bais par comparaison au dolcetto et à la barbera). C’est effectivement l’objectif de sa sélection massale: conserver la petite taille des bais.
Luca croit beaucoup au potentiel de l’Arneis, trop malmené à son gout dans la région par des vins faciles.
Le sol de ce côté du Tanaro est plus sableux, plus léger qu’au sud. La conséquence sur ces fortes pentes est que les plantes ont moins de fond pour se développer et parfois le lessivage par les pluie n’arrange pas la fertilité des sols. Dés le départ, il a commencé en agriculture bio. Les autres vignerons rencontrés dans le Barolo qui revendique des pratiques bio ne veulent pas être certifié. Pour eux, le laxisme des contrôles italiens permet quand même à leur voisins certifiés des pratiques qu’ils réprouvent. La certification est alors juste un label pour répondre aux exigences de certains importateurs nord-américains. Luca en est conscient mais pour son installation il préfère avoir les papiers en règle et une reconnaissance officielle de son travail avant que la renommée lui permette plus d’autonomie.
Dégustation de quelques vins dans la cuisine.
Roero Arneis 2013
Assemblage de deux parcelles, sur la commune de Canale (exposition Est, près de la Cantina) élevé en cuve inox sans malo et sur la commune de Santo Stefano Roero (exposition Sud) élevé en barrique. La macération est longue pour un vin blanc. L’assemblage des deux est faite en janvier. Du gras en bouche, de la puissance. La finale est sur l’acidité, pas encore assemblé.
Roero Arneis 2012
Le même avec un an de bouteille. Plus de fumée au nez, moins d’acidité en finale. Presque tannique ! Bien.
”Arzigh” 2012
Cépage Arnéis. N’a pas cherché l’appellation DOCG Roero Arneis en 2012 parce-qu’il cherche une expression de l’Arnéis différente de la facilité de ce que les consommateurs locaux attendent d’un Roero Arneis. Assemblage d’une sélection de ces deux parcelles (principalement la parcelle sud et la partie la plus pauvre de la parcelle exposé est). “Arzigh” signifie “Hazard”. Vinification et malo en bois. Nez complexe, bouche sur la salinité. Abricot en finale mais différent de l’exubérance d’un viognier. Belle longueur. Intéressant. Par sa texture, rappelle le Coucou blanc d’Elian da Ros.
Roero 2012
Cépage nebbiolo. Ici le terroir est très sableux comparé à l’appellation sudiste Nebbiolo Langhe. Macération de 15-20 jours. Pigeages par de remontages. Bouche très fraise et un peu de menthe poivrée. Finale sur les tanins sans sècheresse. Parlant/vibrant mais un peu simple.
Roero 2011
Le même avec un an de bouteille. Plus rond. Tanins plus fondus en finale. Moins d’acidité rend la finale un peu chaude. Moins de fruits rouges frais.